Depuis 2011 jusqu’à aujourd’hui (31 mai 2022), les caisses des autorités publiques ont été renflouées de 106 milliards de dinars dont 102,4 milliards de dinars de crédits intérieurs et extérieurs et 3,6 milliards de dinars sous forme de dons. Les emprunts encaissés se déclinent entre 40,5 milliards de dinars de crédits intérieurs et 61,8 milliards de dinars de crédits extérieurs, soit quasiment la structure de l’encours de la dette publique actuellement. Si nous n’avions emprunté aucun sou depuis 2011, la dette publique actuelle serait néant.
De même, le cumul des montants des emprunts de l’État sur la période 2011-Mai 2022 correspond à la moyenne du PIB de la Tunisie sur la période 2011-2021 ou aussi à la taille du PIB de l’année 2017.
Exprimées en dollars, les autorités publiques ont encaissé 46,4 milliards de dollars sur la période 2011-mai 2022, répartie entre 44,7 milliards de dollars en crédits et 1,8 milliards de dollars sous forme de dons, dont 405 millions de dollars encaissés en 2012. Les 44,7 milliards de crédits se répartissent entre 27,2 Milliards de dollars de crédits extérieurs et 17,5 milliards de dollars de crédit intérieurs.
Emprunts et dons extérieurs
Dans ce qui suit, nous nous intéressons aux emprunts extérieurs exprimés en dollars et ou en dinars, (les graphiques sont exprimés en dollars et les chiffres de 2009 et 2010 sont donnés à titre indicatif). Comme évoqué précédemment, les fonds encaissés par l’État, provenant de l’extérieur durant la période 2011-mai 2022 totalisent 28,9 Mrds de dollars (65,5 milliards de dinars) partagés entre 27,2 Mrds de dollars (61,8 Mrds de dinars) de crédits extérieurs et 1,8 Mrds de dollars sous forme de Dons (3,6 Mrds de dinars).
Structure des emprunts extérieurs
Les emprunts extérieurs sont composés principalement par les tirages budgétisés (crédits extérieurs destinés à financer le budget de l’État) et accessoirement des Emprunts Extérieurs Affectés aux Projets de l’État et des Prêts Extérieurs Rétrocédés aux Entreprises Publiques. Le cumul des emprunts extérieurs sur la période 2011-mai 2022, soit de 27,2 Mrds de dollars est défalqué entre 22,7 Mrds de dollars (52 Mrds de dinars) de tirages budgétisés (multilatéral, bilatéral et marché financiers), 3,6 Mrds de dollars (8,1 Mrds de dinars) sous forme d’emprunts Extérieurs Affectés aux projets de l’État et 0,9 Mrds de dinars (1,7 Mrds de dinars) de prêts Extérieurs Rétrocédés aux Entreprises Publiques.
Provenance des tirages budgétisés
Les 22,7 Mrds de dinars (52 Mrds de dinars) mobilisés dans le cadre des tirages budgétisé sur toute la période 2011-5 mois 2022, se divisent à leur tour entre 15,7 Mrds de dollars (36,8 Mrds de dinars) sous forme d’appui budgétaire (multilatéral et bilatéral) et 7 Mrds de dollars (15,1 Mrds de dinars) levés sur les marchés financiers étrangers.
Détail des fonds levés dans le cadre de l’appui budgétaire
Durant la période 2011-Mai 2022, les dix principaux bailleurs de fonds de la Tunisie dans le cadre de l’appui budgétaire (coopération bilatérale et multilatérale) sont le FMI avec des financements de 4,5 Mrds de dollars, la banque mondiale (BIRD) avec des crédits de 3,7 Mrds de dollars, la BAD avec de 2,2 Mrds de dollars, l’Union Européenne avec 1,6 Mrds de dollars, Afreximbank avec 0,7 Mrds de dollars, la banque allemande KFW (Établissement de crédit pour la reconstruction) avec une contribution de 0,54 Mrds de dinars, l’Algérie avec 0,53 Mrds de dollars, l’Agence Française de Développement AFD avec 0,53, l’Arabie Saoudite avec 0,51 Mrds de dollars, le Fonds Monétaire Arabe FMA avec 0,48 Mrds de dollars.
Les crédits du FMI
Le FMI a donc accordé 4,5 Mrds de dollars (10,8 Mrds de dinars) à la Tunisie dont 740 millions de dollars (2,1 Mrds de dollars) sous forme d’allocation de DTS au mois de septembre et octobre 2021. Sans tenir compte de cette allocation, les concours du FMI s’élèvent durant la période 2011-mai 2022 à 3,78 Mrds de dinars octroyés sur trois programmes conclus avec la FMI :
- Un premier programme conclu en juin 2013 ayant permis de mobiliser 2 323 millions de dinars sur la période 2013-2015 (autour de 1,5 Mrds de dollars). Ce prêt est assorti des conditions suivantes : une période de remboursement sur 5 ans avec 3 années de grâce, et un taux d’intérêt de 1,08% par an.
- Un deuxième programme dans le cadre d’un « Mécanisme Élargi de Crédit » conclu en mai 2016 portant sur un montant approuvé par le FMI de 2,9 milliards de USD (soit 375% de la quote-part de la Tunisie) étalé sur une période de 4 ans allant de 2016 à 2020. Les conditions de cette facilité prévoient un décaissement sur 9 tirages, une durée de remboursement de 10 ans dont un délai de grâce de 4 ans et demi pour chaque tirage. À la fin de ce programme (arrêté en 2019), la Tunisie n’a bénéficié que de 55% du montant approuvé initialement par le FMI soit 1,6 milliard de dollars (4 222 millions de dinars).
- En avril 2020, le FMI a accordé à la Tunisie dans le cadre de l’instrument de financement rapide, un prêt d’aide d’urgence de 545,2 millions de DTS (745 millions de USD ou 100 % de sa quote-part) pour financer les besoins budgétaires et ceux de la balance des paiements à caractère urgent causés par la crise sanitaire de la covid-19.
L’allocation de Droits de Tirage Spéciaux d’un montant équivalent à 740 millions de dollars a été encaissée par la Tunisie entre septembre 2021 (1039,3 millions de dinars) et octobre 2021 (1047,7 millions de dinars).
Détails des fonds levés sur les marchés financiers
Sur la période 2011-Mai 2022, la Tunisie a levé sur les marchés financiers internationaux, 7 Mrds de dollars (15,1 Mrds de dinars) concentrés entre 2012 et 2019.
La dernière fois où la Tunisie est sortie sur le marché financier international, remonte à 2019, lorsque la BCT a émis pour le compte de l’État la ligne : « Euro Bonds_7 ans_ 6,375% 15/07/2026 700 M € Reg S » d’un montant de 700 millions d’Euro et d’une durée de 7 ans à rembourser in fine le 15 juillet 2026.
L’échéance de remboursement la plus proche dans le temps, concerne la ligne : Garantie JICA 2012_10 ans_25 Mrd YJP_1,19%_18/12/2022 » d’un montant de 25 Mrds de Yen Japonais (590 millions de dinars).
À quoi ont servi les fonds empruntés de l’étranger
En résumé, les autorités publiques ont emprunté de l’extérieur durant la période de 2011-Mai 2022 un montant de 27,2 Mrds de dollars (61,8 Mrds de dinars) auxquels s’ajoute des dons de 1,8 Mrds de dollars (3,6 Mrds de dinars), soit au total 28,9 Mrds de dollars (65,5 Mrds de dinars).
Durant la même période, le budget de l’État a été dépensé :
- 69,4 Mrds de dollars (155,3 Mrds de dinars) au titre des salaires de la fonction publique ;
- 6,6 Mrds de dollars (14,6 Mrds de dinars) au titre des dépenses de gestion et de fonctionnement des ministères et des administrations ;
- 36,3 Mrds de dollars (81,1 Mrds de dinars) au titre des dépenses d’intervention dont 22 Mrds de dollars (46,7 Mrds de dinars) pour la compensation (énergie, produits de base et transport) ;
- 26,4 Mrds de dollar pour l’investissement public (54,4 Mrds de dinars) ;
- 19,4 Mrds de dollars (45,1 Mrds de dinars) au titre du service de la dette publique extérieure défalquée comme suit :
- 5 Mrds de dollars (11,5 Mrds de dinars) pour payer les intérêts de la dette publique extérieure
- 14,4 Mrds de dollars (33,6 Mrds de dinars) pour remboursement du principal de la dette
Au final, notre État providence a dépensé sur la période cumulée 2011-Mai 2022 :
- Des salaires 2,6 fois de plus que les investissements publics ;
- Des dépenses d’intervention pour la compensation, des aides sociales et les injections aux établissements publics 1,4 fois de plus que les investissements publics.
Avant la révolution, le budget alloué aux salaires de la fonction publique un montant annuel stable équivalent à 1,6 fois les dépenses d’investissement, ce multiple a commencé à monter à partir de 2013 avant d’exploser à partir de 2019 pour se situer à 4,5 fois en 2021.
Enfin et sur un total des emprunts extérieurs et dons de 28,9 Mrds de dollars, 19,4 Mrds de dollars (45,1 Mrds de dinars) ont servi pour payer le service de la dette publique extérieure dont 5 Mrds de dollars (11,5 Mrds de dinars) au titre des intérêts de la dette publique extérieure, de quoi couvrir le besoin de financement du budget de l’année 2022 (plus que le montant espéré du FMI).